La Société de Défiance

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Parisiens Vs Oui-Oui

Je me rappelle ces longues conservations inutiles avec des potes Parisiens, conversations durant lesquelles, fort de mes expatriations Londonienne et Zurichoise, je soutenais qu’il y avait une relation directe entre le civisme des citoyens et le sentiment de bien-être que l’on pouvait ressentir au sein d’une société.

La position de mes potes : faire preuve de civisme dans le monde moderne ce n’est pas possible : on n’est pas au pays de oui-oui. La vie Parisienne est une vie ultra-moderne et à ce titre ne peut être qu’aliénante et hystérique.

Une sorte de fatalisme post-moderne qui, à mon sens, est une authentique supercherie intellectuelle et qui, accessoirement, légitimise tout un pan de comportements à l’éthique discutable.

Défiance et auto-destruction

Aussi, quelle ne fut pas ma joie de découvrir cet ouvrage : La Société de Défiance – comment le modèle Français s’auto-détruit. Deux jeunes économistes (Yann Algan et Pierre Cahuc) viennent amener de l’eau (sociologique et scientifique) à mon moulin. Leur théorie est la suivante :

  1. En France bien plus que dans n’importe quel autre pays riche, on se méfie de ses concitoyens, des pouvoirs publics et du marché.
  2. Cette défiance va de pair avec un incivisme bien plus ancré dans les mentalités et constaté dans les actes (édifiant : le livre nous indique par exemple que sur une vingtaine de pays, la France est celui pour lequel une plus forte proportion de la population estime normal d’acheter un produit volé, d’accepter des pots de vins ou de réclamer indûment des aides de l’état. Devant un pays comme le Mexique, pays où on dénombre 15,000 morts violentes par an !)
  3. Ces défiance et incivisme ne sont pas des traits ataviques de notre culture mais les résultats de notre société corporatiste et étatiste, avec un état qui se substitue au dialogue social, et en vide le contenu
  4. Ce déficit de confiance a un impact direct sur l’économie car il réduit significativement l’emploi ou la croissance

« Virtuellement tout échange commercial contient une part de confiance, comme toute transaction qui s’inscrit dans la durée. On peut vraisemblablement soutenir qu’une grande part du retard de développement économique d’une société est due à l’absence de confiance réciproque entre ses citoyens. » (Kenneth Arrow, Prix Nobel d’économie)

Universalisme et égalitarisme Vs Corporatisme

Les comparaisons entre les modèles d’état-providence tels que définis par Gosta Gesping Andersen (conservateurs en France et Allemagne, socio-démocrates en Scandinavie et libéraux dans les pays anglo-saxons) sont riches de nombreux enseignements, en particulier sur l’universalisme ou l’égalitarisme des systèmes.

On apprend ainsi que si en moyenne 90% de la population en âge de travailler (16-65 ans) en Scandinavie est éligible aux allocations de maladie, chômage, retraite , elle n’est que de 70% en France (76% au Royaume Uni). Ou encore que si au Danemark les allocations sociales de base représentent plus de 95% des allocations maximales (système égalitariste) en France elles ne représentent que 57% (Royaume Uni 64%).

Le bonheur qu’on mérite

Là ou cela devient fascinant, c’est que, selon Algan et Cahuc, cette confiance accordée semble être directement proportionnelle au sentiment de bien être que l’on éprouve au sein d’une société comme en atteste le graphe ci-dessous, extrait du livre :

Happiness Vs Trust

(c) Yann Algan et Pierre Cahuc – La Société de Défiance

Free your trust, your ass will follow

J’éprouve toujours beaucoup de gratitude pour ces universitaires qui proposent une perspective nouvelle, une théorie originale appuyée sur des données scientifiques croisées d’une manière inattendue pour décrire ces particularismes de notre société, particularismes que l’on ressent confusément sans savoir trop les expliquer, à la manière du Capitalisme d’Héritiers de Thomas Philippon.

10 Comments

  1. En tant que scientifique (pas tout à fait repenti), je dois mettre en garde contre ton interprétation abusive du graphe que tu cites. Ce graphe semble indiquer une relation du type :

    b = k.c + l

    Où b est le bonheur et c la confiance et k et l des constantes positives. Ce qui te laisse supposer que si je multiplie la confiance par 2, alors le bonheur sera augmenté de manière mécanique.

    Si cette interprétation peut sembler évidente, et scientifiquement exacte, il n’en est rien.

    En effet, on ne fait ici aucun cas des causes et effets. Cette même relation, écrite de la manière suivante :

    c = k.b + l

    Indique elle que si l’on double le bonheur, la confiance augmente.

    Peut être les deux sens dans le relation de causalités sont-ils justes, mais rien n’est moins sûr…

  2. Salut Casa et meilleurs voeux à toi pour 2008 !

    Non bien entendu, cela n’est pas aussi simple et linéaire. J’ai d’ailleurs hésité à mettre ce graphe car hors-contexte cela fait un peu sociologie à la oui-oui.

    Ce graphe arrive au terme du document et vient en conclusion de cette longue reflexion comparative.

    Tout cela pour dire que s’il ne s’agit pas de quelque chose de linéaire, Algan et Cahuc observent une tendance lourde à savoir que le sentiment de bien être au sein d’une société est d’autant plus grand que le sentiment de confiance (envers ses concitoyens, la justice, etc …).

  3. De tt maniere casa, il est jamais content .. avec lui c’est tjrs

    c = -k.b +i

    Mis a part ca .. je croyais que le canada etait le pays de oui-oui ou tout le monde sourit en vous disant”Bonjour .. ca va ?” (Super louche au debut quand meme), en fait il n’en est rien! Le canada est un pays normal .. ‘cest juste la France qui est un pays d’hysterique!

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