USI 2012 : Entretien avec François Hisquin

Alors que la conférence USI s’apprête à fêter son cinquième anniversaire avec l’édition 2012, #hypertextual profite de l’occasion pour discuter avec la personnalité derrière cet évènement de l’industrie des systèmes d’information, évènement singulier de ce côté-ci de l’Atlantique en ce que les geeks et les boss y sont logés à la même enseigne.

François Hisquin a créé Octo (entreprise organisatrice de l’USI) en 1998. Octo est un “Cabinets d’Architectes en Systèmes d’Information” : François insiste sur ce point car il souhaitait vraiment distinguer sa société naissante des Sociétés de Service en Ingénierie Informatique (SSII), terme “qui me posait problème” comme il le concède volontiers.

Ce cabinet a placé au coeur de sa culture le bien-être de ses consultants. Ce qui peut apparaître comme du bullshit RH ou marketing pour certains esprits chagrins est une réalité. Octo walks the talk et aligne ses actes avec ses principes pour un résultat manifeste : la société a été classée ces deux dernières années en première place des Great Places to Work.

L’ouvrage collectif rédigé par différents Octos (comme les dénomme affectueusement notre interlocuteur) Partageons ce qui nous départage est un excellent extrait de cette culture. Une approche à la fois irrévérencieuse (“Les clients c’est comme les enfants : ce n’est pas parce que vous leur dites non qu’ils ne vous aiment plus” entendu durant l’USI 2008), passionnée, pétillante, qui a su adopter pour faire sienne des outils méthodologiques (les core protocols de Jim McCarthy, le ROTI, les méthodes agiles …).

On apprend en outre dans cet ouvrage éclairant que l’entreprise préfère sortir ses consultants de missions fructueuses plutôt que les laisser y dépérir s’ils ne s’y plaisent pas : nos consultants d’abord, les clients ensuite, comme un écho à la célèbre maxime de Vineet Nayar.

Ce qui sort de cet entretien est particulièrement instructif car cette approche, qui peut sembler de prime abord iconoclaste, sert à merveille leur objectif : la quête d’excellence. François Hisquin enrichit le tableau de chasse #hypertextual et nous explique comment ici et maintenant …

1/ Quels motifs vous ont décidé à créer l’USI en 2008 ? Quels est le vide que vous souhaitiez ainsi combler ?

Je m’ennuyais à un symposium du Gartner et je voyais beaucoup de participants le PC sur les genoux (le mac et l’iPad étaient forcément moins répandus !). J’ai eu alors envie de créer une conférence dans laquelle le public serait passionné.

D’autres parts, le monde des conférences informatiques étaient partagé en deux : celles pour les techies et d’autres pour les DSI (Direction des Systèmes d’Information). Conformément à mes convictions, j’ai conçu un événement les réunissant, d’où la conférence pour les geeks et les boss.

2/ Il s’agit déjà de la 5ème édition. Lorsque vous avez commencé en 2008, envisagiez vous un tel succès sur la durée ?

Nous avons mis toute notre énergie dans la première édition qui a été très difficile “à vendre”. Les retours des participants nous ont encouragé à continuer et nous ont permis de nous améliorer.

3/ Lors de l’introduction de la première édition de l’USI en 2008, vous avez évoqué votre expérience aux Etats-Unis où les développeurs y sont considérés comme des rock-stars (ou des demi-dieux, je ne me rappelle plus la terminologie exacte que vous aviez employée). Comment ce fait-il que ce ne soit pas le cas chez nous ?

Moi non plus je ne me souviens plus du terme utilisé. Cette question est un des piliers de notre « why », notre raison d’être. Ceci débute dès l’école où les ingénieurs choisissent souvent d’autres filières que la filière informatique. Cela continue en entreprise. La France n’a pas vraiment de culture IT. Une de nos missions est de redonner ses lettres de noblesse à l’informatique. Ceci passera à mon avis par un rapprochement des écoles et des start-ups à l’instar de ce que l’on trouve à San Francisco.

4/ Parlons un peu de votre entreprise : Octo Technology. Quelle est son histoire ? Quel est son positionnement par rapport à la concurrence ? Quelle est votre élément différenciateur ?

J’ai créé OCTO en 1998 d’une part sur l’envie d’entreprendre, et d’autre part sur le constat qu’il n’existait pas de communauté d’Architectes.  Notre positionnement ne se fait pas par rapport à la concurrence. Si je fais un parallèle  avec le vin (une de me passions), on y trouve beaucoup de vignerons, de grands producteurs mais il n’y a qu’une Romanée Conti. Notre positionnement est un positionnement d’excellence, avec toutes les contraintes associées.

5/ Octo Technology a la réputation d’une organisation avec une culture forte et marquée. S’agit-il d’une volonté à votre niveau d’instaurer cette culture ?

Au risque de vous décevoir, je n’ai pas eu cette volonté. C’est la tribu toute entière qui a développé cette culture. Je n’ai fait qu’en faciliter la mise en place et je suis le garant des valeurs. Le partage est une de nos valeurs. La culture forte et marquée est donc immédiatement partagée avec les nouveaux.

6/Vous offrez tout de même à travers vos principes une perspective neuve et rafraîchissante sur le monde de l’IT. L’ouvrage collectif Partageons ce qui nous départage en est un témoignage fort : les consultants avant les clients, un parti pris fort de la hiérarchie plate, la mise en eouvre de certain des core protocols de communication de Jim McCarthy … Il est difficile de ne pas voir là un volontarisme et un leadership fort pour ce qui relève de la culture d’entreprise …

C’est une question d’évolution. Nous avons tous appris en marchant. J’ai toujours choisi de travailler avec (et donc de recruter) des gens qui me ressemblent. J’assume donc complètement le côté franc-tireur et peu conventionnel. Ensuite c’est surtout une démarche collective, une culture qui s’est construite dans la durée. Le François Hisquin de 2012 n’est pas celui de 1998, date à laquelle j’ai fondé ce cabinet d’architectes. La diversité est un sujet par exemple sur lequel j’ai beaucoup évolué : des gens m’ont fait changer d’avis et aujourd’hui la diversité est quelque chose que je recherche systématiquement.

7/ Comment peut-on faire vivre et promouvoir une telle culture dans une entreprise de consulting où les employés sont la plupart du temps chez les clients ? Comment expliquez-vous que cela soit si rare chez les SSII ?

Plusieurs pistes. En premier lieu, faire que les OCTOs travaillent en équipe chez les clients. Et puis il faut organiser des retours au nid, favoriser la rotation des équipes sur les projets, etc …

La facilité amène les SSII traditionnelles à faire l’inverse, dire oui à tout chez les clients, facturer 100% du temps, éviter les rotations dangereuses….

8/ Quelle est votre lecture de l’évolution des technologies durant ces cinq dernières années ? Comment cela influence au jour le jour votre façon de diriger votre entreprise ?

Au jour le jour non, bien sur. Pour être complètement honnête, je suis surpris par l’innovation et les changements que l’on vit depuis le début d’Internet. Les sujets d’aujourd’hui n’étaient pas envisageables fin 98, le cloud, la mobilité, les réseaux sociaux et les Big Datas.

8/ Comment expliquez vous le retard de l’Europe comparé à l’Amérique du Nord pour tout ce qui est grand services et grandes entreprises du net (Google, Facebook, Twitter, etc… ). Que pourrions-nous faire pour combler ce retard et faire preuve de plus de leadership technologique ?

L’innovation IT vient de la Silicon Valley, cela va perdurer. C’est pervers, les compétences, l’émulation , et les modèles et partenaires sont là.  Le secret vient de l’éducation et du rapprochement des écoles avec ces entreprises innovantes.

Merci beaucoup François et rendez vous à l’USI 2012.

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